de cœur, les formules n’étant rien sans les œuvres. Quoi de plus inoffensif ?
Cependant le succès du piétisme et le zèle indiscret de quelques amis de Spener suscitèrent des difficultés. Spener, il est vrai, était d’une prudence irréprochable. Il ne cessait jamais de protester de son orthodoxie, qui ne prêta en effet à aucune attaque. Mais si réservé qu’il fût, il avait donné le branle à un mouvement dont il ne pouvait arrêter la propagation, et qui allait, en s’étendant, secouer la torpeur universelle.
Après vingt ans de succès toujours croissants à Francfort, Spener fut appelé en Saxe comme premier prédicateur de la cour, et ensuite à Berlin où il mourut. Son action en Saxe avait été décisive. Trois jeunes professeurs de théologie à Leipzig, Francke, Anton et Schade, s’unirent pour fonder une Société d’études bibliques ; il s’agissait d’approfondir l’Écriture sainte dans le texte original. Spener aida de ses conseils ce Collegium philobiblicum, et le dirigea de préférence vers la pratique : ne pas se perdre dans l’érudition, penser toujours au but poursuivi, c’est-à-dire à l’édification des fidèles ; parler d’abondance, simplement, sans apprêt ; enfin, et ceci est le plus important, parler non en latin, mais en allemand. Le succès fut très vif. La jeunesse, désertant les cours des théologiens orthodoxes, se porta en foule à ces leçons. Même les bourgeois de la ville eurent la curiosité d’y venir. Les orthodoxes pour se défendre eurent bientôt recours au bras séculier. Malgré la haute situation de Spener, malgré l’appui du philosophe Thomasius, qui avait à la cour des amis influents, les novateurs turent