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revue destinée spécialement aux femmes ; en 1728-1729, le Brave homme, etc. Le catalogue de ces Magazines qui parurent en allemand de 1711 à 1761 ne présente pas moins de 182 numéros[1], y compris les traductions. Tout d’ailleurs n’y est pas également bon, ou, pour mieux dire, tout y est également mauvais, au moins au point de vue littéraire. Mais cette pullulation même de revues morales, si médiocres qu’elles fussent, prouve qu’elles répondaient à un besoin. La classe moyenne renaissante voulait qu’on ne lui parlât plus seulement de théologie. Elle était heureuse qu’on l’entretînt des intérêts de la vie domestique et sociale, de morale, de pédagogie, d’économie et aussi, à l’occasion, du progrès des sciences. Elle tend à se séparer de la noblesse, qui reste attachée à la langue et aux modes françaises. C’est un premier effort vers l’indépendance, c’est le commencement du réveil.

Le plus intéressant de ces périodiques fut le Patriote de Hambourg (1724-1727), publié par une « Société patriotique » qui comptait parmi ses membres, avec des poètes comme Brockes et des érudits comme Fabricius et Hoffmann, des sénateurs, des jurisconsultes, des ecclésiastiques et d’autres citoyens considérables. « Je pensais, dit l’éditeur anonyme, tirer à 400 exemplaires ; mais il faut rendre justice à mes compatriotes : dans la Haute-Saxe seulement on a souscrit pour cinq mille. » À quoi faut-il attribuer ce succès inattendu ? Ce Patriote avait-il su, mieux que Leibniz, réveiller le sentiment national allemand ? Comprend-il

  1. Hettner, III, 317-325.