Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la décadence politique de l’Allemagne et propose-t-il des moyens d’y remédier ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Les premiers mots du premier numéro édifient tout de suite le lecteur[1]. « Je suis né, dit-il, dans la Haute-Saxe, et j’ai été élevé à Hambourg, mais je regarde le monde entier comme ma patrie, oui, comme une cité unique, et je me considère comme le parent et le concitoyen de tous les hommes. » Voilà comment ce Patriote entend le patriotisme. Ainsi l’entendront la plupart des Allemands du XVIIIe siècle. C’est une disposition d’esprit philosophique, très voisine du cosmopolitisme, n’excluant pas un sentiment d’affection particulière pour le pays où l’on est né, et témoignant d’une parfaite indifférence pour les intérêts purement politiques. « Qu’est-ce qu’un patriote ? Un homme qui s’applique sérieusement au bien de sa patrie, qui confesse sincèrement son Dieu, qui craint l’autorité, honore son pasteur, aime la vérité et l’ordre, etc.[2]. » Cela annonce Herder, qui parlera du patriotisme du chrétien pour sa religion.

Le Patriote s’autorise souvent de l’exemple du Spectator et du Guardian[3]. « J’ai eu l’honneur, dit-il, dans le séjour que j’ai fait à Londres autrefois, de les connaître intimement et de nouer avec eux une amitié étroite. » Il énumère complaisamment les services que ces écrivains ont rendus à l’Angleterre. Son ambition serait de remplir le même office auprès de ses compatriotes, c’est-à-dire des Hambourgeois. Tous ses efforts vont à combattre les préjugés et les

  1. Der Patriot, Hambourg, n°I, 1.
  2. N° IV, p. 29.
  3. N° XXXVI, p. 341.