Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/68

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trois années qui viennent de s’écouler. « Mon principal dessein, dit-il, allait à réformer les mœurs de mes concitoyens ; je voulais aussi leur fournir, une fois par semaine, une lecture morale et intéressante, et épurer un peu leur goût en matière de langue et de style. Pour lire un livre dans sa langue maternelle, il faut aujourd’hui qu’un Allemand sache le français, le latin et l’italien. J’ai tâché d’écrire purement, car ce salmigondis est la peste de notre langue[1]. »

Songez au travail accompli par un nombre considérable de semblables publications. Elles sont peu originales, car elles empruntent sans compter aux moralistes français et anglais. Elles sont à mille pieds au-dessous de leurs modèles. Leurs essais dans la manière de La Bruyère, de Montesquieu, d’Addison, sont d’une lourdeur touchante, et parfois d’une naïveté dans le grotesque qui désarme la critique. Qu’importe d’ailleurs, si leur public ne s’en plaignait point ? Ils n’écrivaient pas pour les classes supérieures, qui ne savaient et ne voulaient lire que du français ; ils s’adressaient à des lecteurs lourds et peu déliés eux-mêmes, qui avaient besoin qu’on leur mit de gros points sur les i, et qui prêtaient plus d’attention au fond des choses qu’à l’élégance du style.

Plus du tiers de ces « Magazines » parurent à Hambourg el à Leipzig. Ce fait s’explique aisément. Hambourg avait entretenu de tout temps un commerce important avec l’Angleterre, et ces relations s’étaient encore resserrées depuis que l’électeur de

  1. CLVI, p. 468-476