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étudiait surtout, d’une part, le droit politique et l’histoire, et, d’autre part, les sciences naturelles et la philologie.

Cette université fondée sans arrière-pensée politique ou religieuse, ce souci de la dignité des maîtres, ce respect de leur liberté intellectuelle : autant de symptômes significatifs qui annoncent le réveil de la vie scientifique en Allemagne. L’étude des chefs-d’œuvre anciens, depuis longtemps purement verbale et embourbée dans une érudition plus que pédante, revient à une plus saine méthode. Gesner, qui contribua à réformer l’enseignement, et qui appartenait lui-même à l’université de Göttingen, raconte que dans sa jeunesse il avait vu un professeur de Iéna, expliquant la Rhétorique d’Arislote, passer quatre leçons entières sur un seul mot de la première phrase[1]. Gesner rappela que l’érudition est un moyen et jamais une fin : vérité qui n’est sans doute pas aussi simple qu’elle en a l’air, puisqu’elle s’oublie si facilement. L’histoire aussi commence à s’émanciper. Jusqu’alors on l’enseignait sans méthode et sans vues générales. On prenait d’habitude pour point de départ la vision du prophète Daniel[2]. On racontait l’histoire des quatre monarchies du monde, c’est-à-dire des empires babylonien, perse, grec et romain, et il fallait que l’histoire de l’empire romain comprît, tant bien que mal, celle des nations chrétiennes. Mascov et Bunau rompent avec cette étrange méthode. Ils étudient l’histoire de la monarchie franque et des

  1. Hettner, III, 310.
  2. Hettner, III, 297-99.