Aller au contenu

Page:Lévy-Bruhl - L’Allemagne depuis Leibniz, 1907.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Frédéric II se piquait d’être un roi philosophe et de le prouver à l’occasion. De bonne heure il lui avait fallu prendre sur lui-même beaucoup d’empire, pour supporter le despotisme capricieux et brutal de son père, qui le traita longtemps avec une dureté inouïe. Plus tard, dans les jours tragiques de la guerre de Sept ans, sans argent, sans alliés, obligé de faire face à la fois à plusieurs ennemis supérieurs en nombre, il eut encore besoin d’une fermeté d’âme peu commune pour ne pas s’abandonner. Mais je ne parle pas seulement de cette sagesse que la vie se charge d’enseigner. Frédéric aimait la philosophie, au sens propre du mot. Cet ordre de questions l’intéressait. Il se plaisait à la lecture des philosophes anciens et modernes ; il ne se lassait point de discuter avec ses familiers sur l’existence de Dieu et l’immortalité de l’âme[1]. On a beaucoup écrit, tant sur la philosophie de Frédéric II que sur ses rapports avec les philosophes ses contemporains, Wolff, Voltaire, Rousseau, Maupertuis, d’Alembert, etc.[2] Nous nous bornerons, après avoir retracé rapidement l’éducation philosophique de Frédéric II, à établir quelles théories de l’État, du gouvernement, de la politique internationale lui ont paru préférables, et comment il les accordait avec la pratique où il était du premier coup passé maître.

  1. Voy. les Entretiens de Frédéric II avec Henri de Catt, publiés par Koser, Leipzig, 1884,
  2. Voy. Bartholmess, Histoire de l’Académie royale de Prusse. — Zeller (Ed.), Friedrich der Grosse als Philosoph, Berlin, 1886. — Rigollot, Frédéric II philosophe, Paris, 1875. — Du Bois-Reymond, Frédéric II et Jean-Jacques Rousseau (Deutsche Rundschau, 1879). — J. Bertrand, d’Alembert. Paris, 1889.