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Page:Lévy-Bruhl - Morceaux choisis, 1936.djvu/153

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Cette liste intéressante passe cependant sous silence des cas importants de souillure. Elle ne mentionne pas, par exemple, les violations de tabou, volontaires ou non, qui sont une cause constante d’impureté. D’autre part, on sera peut-être surpris d’y voir figurer comme « impurs » les enfants, symboles vivants de l’innocence à nos yeux. Mais ce désaccord s’explique par le sens différent que primitifs et civilisés donnent ici aux mots « pur » et « impur ». Quand les Cafres disent que les enfants sont impurs, ils ne pensent pas à une qualification morale. L’impureté qu’ils ont dans l’esprit est analogue à celle des gens en deuil, des guerriers qui ont tué des ennemis, et des femmes en couches. Elle consiste en un certain état de faiblesse, et de danger, d’où l’initiation les fera sortir. Elle les dispense de tabous de nourriture auxquels les adultes sont soumis.

(S. N., pages 284-285.)

Impureté des femmes.

Dans les sociétés primitives, à peu d’exceptions près, il n’est pas d’impureté, au sens où elles prennent le mot, plus redoutée que celle de la femme pendant son indisposition périodique. La femme alors se trouve elle-même sous une mauvaise influence. Mais surtout sa souillure est funeste à son entourage. Le contact du sang cataménial agit comme un poison la femme qui perd ce sang porte malheur à ce qu’elle touche et à qui la touche. (Il faut entendre ici par « poison », comme le font les primitifs, quelque chose qui possède une vertu magique ou surnaturelle pour tuer.)

« Chaque femme qui part pour le domicile conjugal emporte avec elle deux nattes, deux oreillers de bois et deux assortiments d’habits. La vieille natte et les vieux habits seront employés exclusivement pendant les périodes. Pendant ces jours, la femme doit demeurer dans son appartement à elle ; il lui est interdit de fouler aux pieds celui de son mari. La hutte est en effet divisée en deux parties : celle de droite, qui est le domaine du mari, son chilao, et celle qui est à gauche de la porte, chilao de la femme. Il est absolument interdit à l’épouse ayant ses règles de franchir la