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Page:Lévy-Bruhl - Morceaux choisis, 1936.djvu/162

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La même nuit, aussitôt après l’acte, il part avec ses fils… il attaque un hippopotame. »

La fin poursuivie ici est évidemment la même que chez les ba-Ila. Le chasseur thonga commet l’inceste afin de disposer, comme les sorciers, de la puissance magique dont il a besoin pour renforcer le charme qu’il s’est inoculé, et pour dominer ainsi l’hippopotame. M. Smith disait que l’inceste fait de l’homme un sorcier. M. Junod dit qu’il devient un meurtrier. Les deux termes s’équivalent : une des caractéristiques essentielles du sorcier est qu’il tue.

(S. N., pages 254-257.)

Les transgressions portent malheur.

Chez les Lolos, « il y a trois sortes de choses mauvaises, qui infligent des maladies et des malheurs 1o les esprits de ceux qui sont morts de morts impures ; 2o les démons ; 3o les slo-ta : on appelle ainsi les phénomènes insolites, contre nature, qui non seulement annoncent mais causent les désastres (naissances de monstres, poules chantant comme un coq, etc.[1]). » Même croyance et mêmes pratiques dans l’Afrique australe, où les nègres essayent de lutter contre ces « phénomènes insolites » en les supprimant. Ils les appellent « tlolo », ou, selon la traduction de Livingstone, « transgression ». Les albinos sont généralement tués. « Un enfant qui perce ses dents d’en haut avant celles d’en bas était toujours mis à mort chez les Bakaa, et je crois aussi chez les Bakwains. Dans quelques tribus, de deux jumeaux on ne laissait vivre qu’un seul (il pouvait y avoir à cela encore d’autres raisons). Un bœuf qui, couché dans son parc, bat la terre avec sa queue, est traité de la même façon. On croit qu’il invite la mort à visiter la tribu. Lors de mon passage par Londa, mes hommes portaient avec eux une grande quantité de volailles, d’une espèce plus grande que celle de leur pays. Si l’une d’entre elles chantait avant minuit, elle était coupable de tlolo, et on la tuait[2]. »

  1. A. Henry, The Lolos and other tribes of West China. J. A. I., XXXIII, p. 104.
  2. Livingstone, Missionary Travels, p. 577. Cf. Baumann, Usambara und seine Nachbargebiete, p. 43.