« revenait », et que son tombeau actuel ne lui convenait pas[1]… »
Les cheveux et les os du mort.
Les cheveux sont une appartenance des morts particulièrement importante. On sait à quels dangers l’Indien de l’Amérique du Nord s’exposait dans l’espoir d’enlever le scalp d’un ennemi. Ce n’était pas seulement pour la gloire de montrer aux yeux de tous une preuve de sa valeur, et d’exhiber un trophée. La chevelure avait la même valeur mystique que tant de primitifs, par exemple en Indonésie ou en Amérique du Sud, attribuent aux têtes et aux crânes. S’emparer de cette appartenance d’un individu équivalait à se rendre maître de lui-même, et du seul fait de cette possession, un ennemi se trouvait transformé, sinon en protecteur, du moins en auxiliaire ou en serviteur.
Mais l’appartenance pour ainsi dire essentielle du mort, celle qui joue le rôle principal dans les représentations des primitifs, ce sont sans contredit ses os, et plus spécialement son crâne. Les parties molles du corps, surtout sous les climats chauds et humides, disparaissent vite par la putréfaction, à moins qu’on ne trouve moyen d’y parer en embaumant le cadavre, comme on a fait en Égypte et au Pérou. Encore ces deux pays sont-ils très secs. En général, dans les sociétés dont nous nous occupons ici, on n’a pas le moyen de conserver indéfiniment les chairs des cadavres. On y tient d’autant plus à leurs os. Leur dureté même, et le fait que dans la plupart des régions ils échappent à l’action du temps, augmente le respect religieux qu’on leur porte : évidemment il reste en eux beaucoup du mana, ou de l’imunu de l’homme.
La présence des os assure donc celle du mort lui-même. Tout au moins, la possession de cette appartenance donne pouvoir sur lui et garantit son appui. Aux îles de l’Amirauté,
- ↑ R. Brough Smyth, The aborigines of Victoria, I, p. 119 ; — Cf. Eylmann, Die Eingeborenen Süd-Australien, p. 232.