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Page:Lévy-Bruhl - Morceaux choisis, 1936.djvu/228

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toue et même au delà : les Européens viennent du fond de l’eau.

(M. P., page 436.)

Les blancs sont des sorciers.

« Les indigènes croient aussi que les conserves de viande sont faites de chair humaine. Ils avaient toujours entendu dire que les blancs achetaient les esprits des hommes, et maintenant qu’ils ont vu les boîtes de conserves, il n’y a plus de mystère pour eux : ils savent ce que les blancs font de ces esprits. La demeure des blancs, sans aucun doute, est au fond de la mer ; car, sur la côte, on voit les bateaux surgir lentement du large, en premier lieu les mâts, puis la coque[1]. »

On imagine aisément ce que des objets comme la boussole, la lunette d’approche, les jumelles, les miroirs, etc. ont pu causer de surprise et de frayeur aux primitifs quand ils les ont vus pour la première fois. Invariablement, ils ont conclu aussitôt, sans chercher plus loin, que les blancs étaient de bien puissants sorciers. Les objets les plus ordinaires prêtent à la même interprétation. « Le savon, dit M. Macdonald, est une grande nouveauté pour les indigènes. La sensation particulière que donne le contact des étoffes savonnées les amuse beaucoup. Ils croient que le savon est une « médecine » pour étoffes, et ils se fiaient surtout à sa vertu magique, plutôt qu’au fait d’en frotter les étoffes[2]. »

(M. P., page 438.)

Les primitifs et les missionnaires.

S’agit-il de l’action des missionnaires sur leurs catéchumènes ? Les Bantou, sauf exception, ne paraissent guère se la représenter que sous forme physique. Si le missionnaire a obtenu une conversion, il a dû se servir d’un charme qui a transformé les dispositions de l’indigène. Pour détruire

  1. W. H. Bentley, Pioneering on the Congo, I, pp. 252-253.
  2. Rev. D. Macdonald, Africana, II, p. 96.