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Page:Lévy-Bruhl - Morceaux choisis, 1936.djvu/48

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peau. Comme en beaucoup de langues congolaises, un même mot désigne aussi bien la peau que le corps[1]. »

Dans un conte recueilli chez les Safwa… : « Le python s’introduisit dans la hutte, et s’y endormit. Pendant qu’il était là, une jeune fille entra dans la hutte et dit : « Je veux « être la femme du python. » Le serpent prit la jeune fille et elle devint sa femme.

« Une nuit, pendant qu’ils dormaient, la femme s’éveilla et vit que le serpent avait dépouillé sa peau, et était devenu un homme. Alors elle prit vite la peau, et la jeta dans le feu, où elle se consuma. Le lendemain matin, quand le python se réveilla, il chercha sa peau, et depuis ce moment le serpent resta homme pour toujours[2]. »

Lorsque, dans les cérémonies et les danses rituelles, les acteurs ont mis leurs masques et souvent ils portent aussi un costume et des ornements qui complètent la transformation ils sont devenus, ipso facto, les êtres dont les masques, de notre point de vue, sont les symboles et les représentations. — Sur ce point, comme sur tant d’autres, le symbolisme de la mentalité primitive n’a donc pas le même sens que le nôtre. À nos yeux, le symbole figure simplement et, à la rigueur, supplée ce qu’il représente. Mais la mentalité primitive n’est pas habituée au « comme si ». En général elle ne le comprend même pas. Les allégories et les paraboles des livres saints que les missionnaires lui apportent, elle les prend au pied de la lettre, et pour des histoires qui sont vraiment arrivées. Ce que nous appelons ressemblance est, pour le primitif, consubstantialité. De même, le symbole, par la vertu d’une participation, est réellement l’être ou l’objet qu’il représente.

(S. N., pages 125-128.)

La symbolisme dans les objets fabriqués.

Les Marind-anim, comme tant d’autres, ornent régulièrement les objets qu’ils fabriquent de traits empruntés à la figure et au corps de l’homme. Ils y prennent une peine,

  1. C. R. Lagae et V. H. Vanden Plas, La Langue des Azande, III, p. 87.
  2. É. Kootz-Kretschmer, Die Safwa, II, pp. 97-98.