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nisation qui mène à la victoire ; il juge les moyens d’après la fin[1].


e) L’Anarchisme


Stirner est l’ennemi de l’État, parce que l’État est d’une part une autorité, d’autre part une organisation stable (il insiste souvent sur l’étymologie status) ; l’autorité de l’État humilie le moi ; la stabilité de l’État empêche le moi d’évoluer librement.

L’État est d’abord une autorité : il organise la soumission des citoyens. La forme de gouvernement ne modifie en rien le caractère de l’État : Supposons que le roi, qui confère une part de son autorité à tous ses mandataires, des ministres jusqu’au bourreau inclusivement, vienne à disparaître : la majorité des citoyens maintiendrait néanmoins dans la dépendance tous les adversaires de l’ordre établi. L’expérience a d’ailleurs été faite par la France, après la Révolution de 1789 ; on a supprimé les différences entre les ordres, proclamé la liberté et l’égalité de tous les citoyens : a-t-on par là donné à chacun l’indépendance ? Non, on a simplement substitué à l’autorité du prince, l’autorité de la nation. La nation a maintenant les droits régaliens, elle prélève les dîmes, impose les corvées, juge et condamne, accorde

  1. Ce n’est pas un hasard si Nietzsche, même pendant sa seconde période, où il se rapproche le plus des idées modernes, prend la défense des jésuites : il se demande si leurs adversaires sauraient faire preuve du même dévouement, de la même discipline.