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Page:L’Œuvre de P.-C. Blessebois, 1921.djvu/130

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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


cruautés qu’il avait exercées contre le public. Dans cette juste appréhension : « Ah ! mes amis, s’écria-t-il, arrêtez votre fureur, je vous en conjure, au nom de tous vos parents que mon injustice a conduits en paradis et envers qui votre dévotion ne saurait manquer d’être extrême. J’ai donné lieu à votre emportement, je l’avoue, mais je saurai réprimer mon funeste penchant, si vous ne vous portez pas aux extrêmes résolutions contre ma vie. Je vous ferai connaître à l’avenir, par indulgence que j’aurai pour vos crimes, que le proverbe n’est pas faux qui dit que les hommes changent d’humeur de temps en temps, et que celui-là était hier un tigre insatiable en qui nous trouvons aujourd’hui une douceur de mouton. »

Ce peuple, que la tête de la petite Hïante avait déjà disposé à la joie, ne put s’empêcher d’éclater de toute sa puissance aux discours du pou de la ville et fit des grimaces à la villageoise, si bouffonnes et si comiques que le beau prisonnier aurait sans doute effacé le souvenir de ses chaînes si ce divertissement lui avait été accordé. Sa vaine et ridicule appréhension lui avait fait dire beaucoup d’extravagances, mais un de ses confrères qui l’avait écouté, levant la voix : « Parbleu ! lui dit-il, vous tenez là de plaisants discours. Et qu’avez-vous à redouter de l’impuissance de ces malheureux, dans le sein d’une si bonne ville ? Descendez seulement et nous venez apprendre quel diantre d’oiseau que c’est celui que nous voyons à votre porte.