Aller au contenu

Page:L’Œuvre de P.-C. Blessebois, 1921.djvu/158

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

144
L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


ne sais pas encore s’il était rebuté ou s’il me voulait charmer par les douceurs de sa muse, mais quoi qu’il en soit, il m’envoya un jour ces vers :


            De Scay, je renonce à mon titre :
Être votre galant, c’est être malheureux ;
Votre amour en sagesse égale un porte-mître
Et produit des glaçons, loin d’allumer des feux.
            Le mien est un petit bélître
Qui ne sait ce que c’est que d’être scrupuleux ;
Qui pour être mieux vu casse d’abord la vitre,
Et qui parle tout haut quand il pousse des vœux.
            Cette humeur, contraire à la vôtre,
            Veut que je me donne à quelqu’autre
Dont l’inclination à l’amoureuse ardeur,
            Exempte de votre scrupule,
            L’empêche de ferrer la mule
            Aux soupirs de mon triste cœur.


Je les trouvai passables, et l’appréhension que j’eus qu’il ne dît vrai me mit la plume à la main, pour lui répondre en ces termes :


            Quoi ! pourriez-vous, en bonne foi,
            Aimer un autre objet que moi ?
            Si je vous en croyais capable,
Marquis, je taxerais mon destin de coupable,
            Qui me range sous votre loi.
            Je vous reçois ; c’est assez feindre ;
            Venez me voir ce billet lu ;
            Votre amour n’a plus rien à craindre :
            Je vous aime et vous m’avez plu.