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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


Mais quoi ! j’avais assez de mes propres malheurs,
Et pour la soulager me croyant inutile,
Mon teint prit seulement quantité de couleurs
Qui flattèrent l’espoir de ce fin crocodile.

Qui plus est, je crus bonnement qu’elle se moquait de moi et j’ouvrais la bouche pour m’en plaindre, quand elle me la referma par une innocence qui a ouvert le théâtre à la pièce qui a été jouée, qui, dans le fond, n’est qu’une bagatelle, et que néanmoins on voudrait faire dégénérer en tragédie, si je ne faisais sortir la vérité de son puits.

            C’est ainsi que d’une étincelle
            Il naît un grand embrasement ;
Si la comparaison ne semble pas nouvelle,
            Au moins elle va rondement.

— Vous voilà bien surpris, monsieur de C....., reprit la comtesse. Croyez-vous donc que le marquis ne m’a pas dit ce que vous savez faire ? — Eh ! que sais-je faire, madame ? — Tout ce qui vous plaît, continua-t-elle ; le bien et le mal sont également dans votre disposition, et vous allumez l’amour et la haine avec autant de facilité qu’une autre personne allume ou éteint un flambeau. — Apparemment que je suis sorcier, répartis-je. — Non, acheva-t-elle, mais vous êtes magicien, vous tenez le diable soumis à vos ordres, et c’est un peu de secours de l’art que je