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Page:L’Œuvre de P.-C. Blessebois, 1921.djvu/261

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LE ZOMBI DU GRAND-PÉROU


Mais à peine y avait-il une heure que nous avions pris congé d’elle que je vis entrer dans ma chambre le petit frère du baron du Marigot, lequel me présenta gros comme le poing de cire blanche de la part de la comtesse de Cocagne. Cet enfant me dit qu’elle me priait d’en former deux images, l’une qui ressemblât à une vieille de septante années et l’autre à un jeune homme dans sa puberté, et que je ne manquasse point à les lui porter avant de me coucher, si je voulais qu’elle eût bonne opinion de mon obéissance. Je donnai donc incontinent dans le vrai de la chose ; il ne fallait pas être sorcier pour deviner une énigme si grossière. Néanmoins, soit que ce ne fût guère mon métier que de faire des poupées, ou soit que je me portasse à ce travail avec beaucoup de lenteur, le soleil se dérobait à nos yeux quand j’eus à peu près figuré une vieille telle que la comtesse de Cocagne me la demandait, et que je ne lui portai que celle-là.

      « Prenez, lui dis-je, aimable pécheresse,
            Ce simulacre de vieillesse.
Pour accomplir vos lois, j’amollirais l’acier ;
            Mais rien n’est caché sur la terre :
Ce secret sera su, l’on me fera la guerre,
            Et je passerai pour sorcier. »

Elle la contempla mille fois des pieds jusqu’à la tête et la trouvant mieux proportionnée à sa ressemblance qu’elle ne l’avait peut-être espéré, elle me