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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


dis-je, pour cette nuit, attendez à demain. — Non, répondit-elle, n’attendons point à demain, je vous en prie. — Puisque vous voulez tout savoir, repris-je, sachez, madame, que la manière dont j’ai rendu le prince étranger invisible, et que je le vais aussi devenir, n’a rien de commun avec celle dont vous l’étiez quand vous fîtes le Zombi au Grand-Pérou. C’est en esprit que nous allons cette nuit voltiger de çà et de là, tandis que nos corps resteront dans les aziers, ou sous quelque roche écartée du chemin. — Eh bien, interrompit-elle, n’importe, menez-moi avec vous ; me voici déjà toute nue, et mon corps est assez bien ici. — Vous êtes opiniâtre, madame, lui dis-je encore ; mais enfin je veux tout ce que vous voulez, et je ferais en sorte que les Zombis de ronde, qui sont mes petits cousins, viendront vous enlever ; mais je vous avertis d’être couchée sur le dos, d’avoir la bouche et les yeux fermés, car si vous veniez à sortir de votre place, à voir ou à parler, ce serait fait de votre vie. Vous entendrez peut-être des voix qui tâcheront de vous la faire articuler ; donnez-vous-en bien de garde ; les esprits sont malins, ils vous séduiront si vous êtes crédule, et j’aurais beaucoup de douleur s’il vous arrivait du mal. Je vais préparer les choses qui sont nécessaires à mon essor. Adieu, madame ; si vous voulez venir, observez bien ces lois ; sinon baignez vous, et retournez à la case, ce sera le plus court. »