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Page:L’Œuvre de P.-C. Blessebois, 1921.djvu/280

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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


            Je me sentais tant d’innocence
            De tout ce qui s’était passé
            Que j’en faisais en conscience
Moins d’estime et de cas que d’un verre cassé.
            Ah ! me disais-je à la sourdine,
            Le lion marche à la rapine
            Avec une fierté de roi ;
            À son aspect, on songe à soi
            Plus qu’aux moutons qu’il extermine ;
            De crainte de plus grand danger,
            Chacun le laisse ravager ;
            Mais lorsque des bois il se coule
            Dans les hameaux quelque renard,
            Il ne surprend point une poule
            Sans mettre sa vie en hasard.

Il n’y avait pas un quart d’heure que je lui avais envoyé un nègre quand le sien me vint dire à l’oreille qu’elle était à la barrière et qu’elle demandait à me parler. Je la fus trouver, et je commençai par lui faire des reproches. Jamais je ne lui ai vu l’air plus effronté qu’elle l’avait ce jour-là. « C’est à moi à vous quereller, me dit-elle ; et vous jouez mon personnage. Vous ne m’avez pas mal dupée, monsieur de C... ! Vos diantres de petits cousins m’ont fait mille folies ; ils m’ont piqué les fesses, mordu le bout du nez et arraché la moitié de la barbe de celui que vous aimez tant. Jamais de petits singes n’ont pris tant de plaisir à plumer une pauvre poule qu’ils semblaient en prendre à me l’arracher poil par poil.