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Page:L’Œuvre de P.-C. Blessebois, 1921.djvu/292

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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


            Ce vrai baudet ne put ouïr
            Ce que lui dit l’ânesse feinte ;
            Il se ressouvient toutefois
            Que la bête lui dit deux fois :
            « Où courez-vous si tard, mon frère ? »
Ainsi mal à propos parle ce rapporteur,
            Ce cruel au cœur de vipère
            Qui dépose contre sa sœur.

            Celui-là, non moins infidèle
Et peut-être plus fourbe encor que le premier,
            Dit qu’un jour, chassant au ramier
            Vers la maison de cette belle,
      Il en vit un sur le haut d’un sureau
            Qui lui faisait tout à fait beau,
            Qu’il le tire et le jette à terre ;
            Mais que, baissé pour l’amasser,
L’oiseau se change en femme, et la femme le serre
            Et le force de l’embrasser.

            L’un dit qu’il l’a vue en truie,
            Avec quinze marcassins blancs,
Vers l’endroit du marquis par où passent ses gens
            Pour entrer dans la sucrerie ;
            Et qu’en ce verdoyant pâtis
La laie en belle humeur et ses quinze petits
            Dansaient sur les pieds de derrière,
Tandis qu’au milieu d’eux, un bouc à poil de rat
            Chantait en langage vulgaire
            Le ballet qu’on danse au sabbat.

            L’autre jure et rend témoignage
            Qu’une nuit cet esprit malin