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L’ŒUVRE DE P.-CORNEILLE BLESSEBOIS


Dorimène poussa ces mots avec tant d’émotion que Hïante, la prenant dans ses bras :


    Qu’est-ce donc, hélas ! lui dit-elle ;
    Mademoiselle, qu’avez-vous ?

DORIMÈNE

Ah ! que pourrais-je avoir, sinon un mal si doux
Que mon cœur en souhaite une suite éternelle.
L’amour brûle mon sein, ne le connais-tu pas,
    Toi qui sais si bien ses maximes
Et qui l’as si souvent produit par tes appas ?

HÏANTE

   L’amour est le moindre des crimes
  Et le plus grand des plaisirs d’ici-bas.
Mais quel est de vos feux le mignon désirable ?
M’en pourriez-vous bien faire un portrait véritable ?

DORIMÈNE

   Pourquoi non ? puisque dans mon cœur
   J’en ai l’une et l’autre couleur,
   Et que mon imaginative,
   Selon les lois de mon ardeur,
   En garde une peinture vive ?

   Tu dois savoir, en premier lieu,
   Qu’il est aussi beau comme un ange,
   Et s’il aime à garder le change,
   Qu’il est aussi parfait qu’un dieu.

   Déjà notre sexe l’adore
   Et va décorer les autels
   De ses attributs immortels,
   Des plus riches bouquets de Flore.