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zéro (*[1]). Les algébristes arabes, qui considèrent tous les éléments d’une équation, et notamment aussi l’inconnue, comme des quantités positives, ne pouvaient pas avoir l’idée de ces formes.

Toutefois, il en très-surprenant qu’Alkhayyâmi, en construisant les équations du troisième degré, n’ait pas remarqué l’existence des racines négatives. Rien, en effet, n’est plus propre à montrer celles-ci pour ainsi dire d’une manière palpable, et en même temps à donner des idées justes et nettes sur leur nature, que la construction des équations. C’est la vicieuse habitude de ne tracer que des demi-cercles, des demi-paraboles, et une seule branche des hyperboles, qui a fait manquer au géomètre arabe cette belle découverte.

Ce défaut de ses constructions a même une fois empêché notre auteur de voir qu’une équation a deux racines positives, dont il ne construit qu’une seule (voir la note p. 68). Il tombe dans une autre erreur semblable, mais plus regrettable encore, parce qu’elle touche à quelques considérations fondamentales sur la nature des équations cubiques. C’est qu’Alkhayyâmi, en construisant l’équation , ne trouve qu’une seule racine positive, tandis qu’elle en admet trois (voir la note p. 65) (**[2]).

Les Arabes savaient déjà qu’il existait une certaine équation du second degré à deux racines (***[3]) ; si donc Alkhayyâmi avait remarqué que pareillement une équation cubique admettait, en certains cas, trois solutions, il est difficile à croire que cette coïncidence entre le degré du problème et le nombre des solutions ne l’eût pas frappé et conduit à des réflexions, et peut-être à des découvertes, ultérieures.

À l’exception des deux erreurs dont je viens de parler, Alkhayyâmi discute avec une justesse parfaite le nombre des racines positives, ou, si l’on veut, le nombre des intersections des deux coniques qui construisent l’équation, du côté des coordonnées positives. Il ne trouve donc qu’une seule solution pour les équations 3, 13, 15, 16, 18, 19, 22, 23, 24, dont le terme connu est affecté du signe négatif. Il en trouve deux pour les équations 14, 17, 20, 21, 23 (****[4]), dont le terme connu est affecté du signe positif, mais dont les deux racines conjuguées sont ou imaginaires ou posi-

  1. *) — Ces formes sont également négligées par Cardan, par Viète, et même par Harriot, bien que celui-ci fût auteur de l’usage d’écrire les équations en forme d’une somme algèbrique égalée à zéro. Descartes est le premier qui discute ces formes. Voir les œuvres de Descartes publiées par V. Cousin, tom. V, p. 386 à 428, et particulièrement pages 389, 399, 404, 405.
  2. **) Ici l’erreur provient de ce que l’auteur n’a pas bien discuté les intersections du cercle et de l’hyperbole fig. 28, 1 ; car les deux courbes peuvent avoir deux rencontres de plus sur les parties de leurs circonférences comprises entre A et E.
  3. ***) Diophante ne parle encore que d’une seule racine en ce cas.
  4. ****) Abstraction faite de l’erreur commise dans la construction de cette dernière équation.