Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/107

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trer Martan, à une lieue environ de Mamuga. Martan faisait porter devant lui, avec une grande ostentation, le prix du tournoi.

Au premier abord, Aquilant, trompé par les armes et ces vêtements plus blancs que la neige immaculée, croit que c’est son frère, et avec ce oh ! qui d’habitude exprime l’allégresse, il court à sa rencontre ; mais il change soudain de langage et de manières quand, arrivé plus près, il s’aperçoit que ce n’est pas lui.

Il craint que, grâce aux artifices de celle qui est avec lui, Martan n’ait tué Griffon, « Dis-moi — lui crie-t-il — toi qui dois être un voleur et un traître, comme tu en as le visage, comment ces armes sont-elles en ta possession ? D’où vient que tu es monté sur le bon destrier de mon frère ? Dis-moi si mon frère est mort ou vivant, et de quelle façon tu lui as dérobé ses armes et son destrier ? »

Lorsque Origile entend cette voix pleine de colère, elle veut faire tourner bride à son palefroi pour fuir. Mais Aquilant, plus prompt qu’elle, l’arrête, qu’elle le veuille ou non. Martan, devant l’air menaçant et terrible du chevalier qui lui est apparu ainsi à l’improviste, pâlit et tremble comme la feuille au vent, et ne sait que faire et que répondre.

Aquilant crie et fulmine toujours ; il lui pose l’épée droit sur la gorge, en jurant qu’il leur coupera la tête, à Origile et à lui, s’ils ne lui disent pas immédiatement toute la vérité. Le malencontreux Martan balbutie un moment, et cherche à part lui