Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/137

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cheuse par les chasseurs des Alpes, se tient près de ses petits, incertaine de ce qu’elle doit faire, et frémit tout à la fois de tendresse et de rage. La colère et son instinct féroce la poussent à jouer des griffes et à s’abreuver de sang ; mais l’amour maternel tempère sa fureur, et la retient auprès de ses oursons.

Cloridan, qui ne sait comment venir en aide à Médor, veut mourir avec lui ; mais avant de mourir il songe à faire plus d’une victime. Il pose sur son arc une de ses flèches les plus acérées, et, de l’endroit où il est caché, il ajuste si bien, qu’il transperce la cervelle d’un Écossais. Celui-ci tombe de selle, sans vie.

Tous les autres se tournent du côté d’où est venu le trait homicide. Pendant ce temps, le Sarrasin envoie une autre flèche qui couche, près du premier, un second cavalier. Celui-ci s’était penché vivement pour demander à son compagnon tombé s’il savait qui avait tiré, quand la flèche arrive, lui traverse la gorge et lui coupe la parole.

À cette vue, Zerbin, leur capitaine, ne peut plus se contenir. Plein de colère et de fureur, il court à Médor, criant : « C’est toi qui le paieras. » Il plonge sa main dans sa chevelure d’or et l’attire violemment à lui. Mais à peine a-t-il jeté les yeux sur ce charmant visage, qu’il est pris de pitié et ne se sent pas le courage de le tuer.

Le jouvenceau a recours aux prières ; il dit : « Chevalier, au nom de ton Dieu, ne sois pas assez cruel pour m’empêcher d’ensevelir le