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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/141

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vers le lieu où Médor perd sa force avec le sang qui sort de sa poitrine, et dont il a déjà tellement rougi la terre, que la vie est près de lui échapper.

Angélique descend de son palefroi, et fait aussi mettre pied à terre au berger. Elle broie les herbes entre deux pierres, puis elle les presse et en reçoit le suc dans ses mains blanches. Elle le verse dans la plaie, et en frotte la poitrine, le ventre et les flancs de Médor. La vertu de cette liqueur est telle, que le sang s’arrête soudain, et que les forces reviennent au blessé.

Il peut monter sur le cheval que le berger conduit. Mais il ne veut point s’éloigner avant que son maître ne soit dans la terre. Il le fait ensevelir, ainsi que Cloridan ; puis il se laisse conduire où il plaît à Angélique. La belle, par humanité, reste avec lui dans l’humble cabane du berger hospitalier.

Elle ne veut point partir avant qu’il ne soit revenu à la santé, tellement elle le tient en estime, tellement elle l’a pris en pitié depuis qu’elle l’a vu étendu sur la terre. Puis, en contemplant ses grâces et sa beauté, elle sent son cœur rongé comme par une lime, et le feu de l’amour l’embraser peu à peu tout entier.

Le berger habitait une assez bonne et belle chaumière, située dans le bois, et blottie entre deux collines. Il l’avait peu auparavant rebâtie tout à neuf, et il avait avec lui sa femme et ses enfants. C’est là que la blessure de Médor est promptement guérie par la donzelle. Mais, en