Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/152

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monter, bien qu’elle y soit peu apte, mais elle espère qu’à défaut de la nature son épée suffira pour la tirer d’affaire.

Après s’être entendus, ils chargent d’un commun accord le patron de répondre qu’il y a sur le navire des gens disposés à affronter les dangers du champ clos et du lit. Aussitôt tous les obstacles s’abaissent, le pilote accoste, déploie le câble et fait mordre l’ancre ; le pont est jeté, et les guerriers sortent du navire, tirant leurs destriers après eux.

Puis ils vont à travers la ville, qu’ils trouvent pleine de donzelles hardies, chevauchant dans les rues et luttant sur les places comme de vraies guerrières. Ici, il est défendu aux hommes de chausser l’éperon, de ceindre l’épée ou de porter aucune arme, excepté toutefois aux dix qui sont chargés de faire respecter l’antique coutume que je vous ai dite.


Tous les autres tiennent la navette, l’aiguille, le fuseau, ou sont occupés à se peigner et à se parer. Vêtus d’habits de femme, ils vont toujours à pied, ce qui leur donne un air mou et efféminé. Quelques-uns sont enchaînés et réservés pour les travaux de l’agriculture, ou pour la garde des troupeaux. En somme, les hommes sont peu nombreux ; c’est à peine si, pour mille femmes, on en compte cent, dans la ville et dans toute la contrée.

Les chevaliers conviennent de tirer au sort celui d’entre eux qui devra, pour le salut commun, lutter contre les dix champions dans la lice, et combattre ensuite sur un autre champ de bataille. Ils veulent