Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

après avoir surmonté la première épreuve, doit succomber dans la seconde ; elle aura donc vaincu sans aucun profit ; ils n’en deviendront pas moins esclaves, et elle sera mise à mort.

D’un autre côté, l’extrême jeunesse, la courtoisie et la vaillance du jeune chevalier ont tellement touché de pitié et d’affection le cœur de Marphise et de ses compagnons, qu’il semble qu’ils auraient presque du regret de devoir leur liberté à sa mort. Si Marphise ne peut se dispenser de le tuer, elle veut mourir, elle aussi.

Elle dit à Guidon : « Viens avec nous, et nous sortirons d’ici de vive force. » « Hélas ! — répondit Guidon — laisse tout espoir de t’échapper jamais, et résous-toi à vaincre ou à périr de ma main. » Elle répliqua : « Jamais mon cœur n’a tremblé pour achever ce que j’ai entrepris, et je ne connais pas de route plus sûre que celle que m’ouvre mon épée.

« J’ai tellement éprouvé ta valeur sur le champ de bataille, que si tu es avec nous, je ne recule devant aucune tentative. Quand la foule sera demain assise tout autour de la lice, je veux que nous massacrions toutes ces femmes, qu’elles prennent la fuite, ou qu’elles cherchent à se défendre, et que nous abandonnions leurs corps aux loups et aux vautours de ce pays. Quant à la ville, nous y mettrons le feu. »

Guidon lui répondit : « Je serai prompt à te suivre et à mourir à tes côtés. Mais n’espérons pas sortir de là vivants ; qu’il nous suffise de venger