Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/236

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dans les reins, le frappe et le serre de près ; elle est sans cesse sur ses épaules et ne lui laisse pas un moment de répit. Grande est la rumeur, et le bois en retentit tout alentour. Personne, au château, ne s’est encore aperçu de cet incident, car on ne regarde que Roger.

Cependant les trois autres chevaliers étaient sortis de la forteresse, ayant avec eux la dame inique qui avait imposé l’infâme coutume. Chacun d’eux préférerait la mort à une vie digne de blâme ; aussi leur visage est rouge de honte, et leur cœur est brisé de douleur d’aller, à eux trois, combattre contre un seul.

La cruelle courtisane qui avait fait établir cette infâme coutume et qui la faisait observer, leur rappelle le serment qu’ils lui ont fait de la venger. « Puisque je suis sûr de l’abattre avec ma lance — lui dit Guidon le Sauvage — pourquoi veux-tu que mes amis m’accompagnent ? Si je mens, fais-moi couper ensuite la tête ; je serai content. »

Ainsi disait Griffon, ainsi disait Aquilant. Chacun des trois chevaliers veut combattre seul, et préfère la prison ou la mort à la honte de combattre plus d’un contre un seul adversaire. La dame leur dit : « Toutes vos paroles sont inutiles. Je vous ai conduits ici pour enlever les armes de ce chevalier, et non pour faire une nouvelle loi et un nouveau traité.

« Quand je vous tenais en prison, c’était le moment de m’alléguer ces raisons, et non maintenant,