Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/293

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frappe le bouclier, l’entr’ouvre du sommet à la-base en deux parties égales, coupe le brassard, entaille le bras, et, brisant l’armure, descend encore sur la cuisse.

Zerbin cherche de tous côtés à blesser son adversaire sans pouvoir jamais y parvenir, car l’armure sur laquelle il frappe ne garde pas même la moindre trace de ses coups. De son côté, le roi de Tartarie prend un tel avantage sur Zerbin, qu’il le blesse en sept ou huit endroits, lui enlève son bouclier et lui rompt à moitié son casque.

Cependant Zerbin va perdant son sang ; la force lui manque, bien qu’il ne s’en aperçoive pas encore. Son cœur vaillant, qui ne faiblit pas, suffit à soutenir son corps épuisé. Cependant sa dame, toute pâle de terreur, s’approche de Doralice et la supplie au nom de Dieu de faire cesser ce combat acharné et cruel.

Courtoise autant que belle, Doralice, encore peu rassurée elle-même sur l’issue du combat, fait volontiers ce que lui dit Isabelle et dispose son amant à la paix et à une trêve. De même, aux prières d’Isabelle, la colère vengeresse s’enfuit du cœur de Zerbin. Il s’éloigne par la route où elle l’entraîne, sans terminer son entreprise en faveur de l’épée du Comte.

Fleur-de-Lys, qui voit la bonne épée du malheureux Comte si mal défendue, s’afflige en silence. La douleur l’oppresse tellement, qu’elle pleure de colère et se frappe le front. Elle voudrait avoir Brandimart auprès d’elle pour tenter l’entreprise.