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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/298

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lui-même, et tous deux s’avancent pendant- plusieurs jours à travers la forêt.

Le prudent vieillard ne voulut pas se retirer, seul à seule avec la belle jeune fille, dans la caverne sauvage où il avait, non loin de là, sa cellule solitaire. Il se disait à part lui : « Il y a danger de tenir dans une seule main la paille et la flamme. » Il ne se fiait point non plus à son âge ni à sa sagesse, pour risquer une semblable épreuve.

Il lui vint à la pensée de conduire Isabelle en Provence, près de Marseille, dans un château où se trouvait un monastère de saintes femmes, riche et bel édifice. Pour emporter le corps du chevalier, il fit construire dans un château qu’ils rencontrèrent sur leur route, un cercueil long et large, et bien calfeutré avec de la poix. —

Pendant plusieurs jours, ils parcoururent un long espace, choisissant toujours les lieux les plus déserts, afin de passer inaperçus dans ce pays où tout présentait l’image de la guerre. À la fin, le passage leur fut barré par un chevalier qui les accabla d’outrages et d’injures. J’en parlerai en son lieu ; pour le moment, je retourne au roi de Tartarie.

Le combat ayant eu la fin que je vous ai dite, le jeune guerrier s’était retiré sous de frais ombrages près d’une onde limpide, après avoir ôté la selle et la bride à son destrier qu’il laissa paître en liberté l’herbe tendre. Mais au bout de quelques instants il vit venir de loin un chevalier qui descendait de la montagne vers la plaine.