Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/310

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ordinaires. Peut-être avez-vous vu une sœur à moi, qui a endossé l’armure et porte l’épée au flanc. Nous sommes jumeaux, et elle me ressemble tellement, que, dans notre famille, on ne peut nous distinguer l’un de l’autre.

« Vous ne seriez pas le premier, ni le second, ni même le quatrième qui auriez été pris à cette ressemblance, puisque mon père, mes frères, et jusqu’à celle qui nous a donné le jour à tous deux, ne savent pas nous distinguer. Il est vrai que la chevelure que je porte courte et rare, comme tous les hommes, et les longs cheveux de ma sœur, arrangés en tresses, faisaient la seule différence qui existât entre nous ;

« Mais depuis qu’un jour elle fut blessée à la tête — il serait trop long de vous dire comment — et que, pour la guérir, un serviteur de Jésus lui eut taillé les cheveux au niveau de l’oreille, aucune différence ne subsista plus entre nous, si ce n’est le sexe et le nom. Je suis Richardet, et ma sœur s’appelle Bradamante. Je suis le frère de Renaud ; elle en est la sœur.

« Et.si cela ne vous ennuyait pas de m’écouter, je vous dirais une chose qui vous stupéfierait ; je vous dirais ce qui m’advint, par suite de cette ressemblance. C’est une aventure qui, après m’avoir causé beaucoup de joie au commencement, a failli amener mon martyre. » Roger, à qui l’on n’aurait pu raconter de plus douce histoire que celle où était mêlé le souvenir de sa dame, le pria de continuer, et le jeune chevalier lui dit :