Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/41

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que celui qui s’avance est Renaud, ne change pas de visage. Ne pensant pas trouver si rude résistance, il lance son destrier au galop à la rencontre du chevalier.

Avant de partir, il assure sa lance, rassemble toutes ses forces, puis il excite son destrier des deux éperons à la fois et lui abandonne les rênes. De son côté, le fils d’Aymon, ou plutôt le fils de Mars, déploie sa valeur habituelle, et se montre digne du grand renom que lui ont acquis dans les joutes sa grâce et son habileté.

Les coups furent de part et d’autre résolument portés, et les deux fers frappèrent la tête ; mais ils différèrent en force et en résultat, car l’un des deux chevaliers poursuivit sa course, tandis que l’autre restait mort. Il faut, pour prouver sa valeur, autre chose que mettre avec grâce la lance en arrêt ; il faut aussi que la fortune soit favorable ; sans elle le courage suffit rarement, ou presque jamais.

Le paladin assure de nouveau sa bonne lance, et se précipite vers le roi d’Oran dont le courage est aussi mesquin que sa stature est colossale. Renaud se prépare à lui porter un de ces coups dont il est fait mention, mais il l’atteignit seulement au bas de l’écu. À qui voudrait l’en blâmer, je donnerai pour excuse qu’il ne pouvait atteindre plus haut.

Bien qu’il soit recouvert d’acier, l’écu n’empêche pas la lance de pénétrer d’une palme dans le corps du roi, dont l’âme vile et lâche s’échappe par une grande blessure qu’il a reçue dans le ventre. Son