Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sements, les lamentations dont il semble que le ciel tout entier retentisse, forment un tumulte effroyable, pareil à celui dont le Nil, près de ses chutes, assourdit les habitants voisins des rives.

Une ombre épaisse, produite par les flèches lancées des deux côtés, obscurcit le ciel ; l’haleine des combattants, la fumée, la sueur, la poussière font dans l’air comme un nuage sombre. Les deux armées se portent tantôt ici, tantôt là ; les uns poursuivent, les autres fuient ; vous verriez souvent le guerrier tomber mort sur l’ennemi qu’il vient de tuer.

Quand une troupe est fatiguée, une autre s’avance aussitôt ; de part et d’autre, le nombre des combattants augmente. Là sont les cavaliers, ici les fantassins. La terre sur laquelle se livre cet assaut est rouge ; l’herbe, auparavant verte, s’est recouverte d’un manteau de sang, et là où s’épanouissaient les fleurs jaunes ou d’azur, gisent les cadavres des hommes et des chevaux.

Zerbin se signale par les plus admirables prouesses qu’ait jamais faites garçon de son âge ; il taille, tue et détruit les païens, qui tombent en foule autour de lui comme la pluie. Ariodant donne de grandes preuves de courage en présence de ses nouveaux sujets, et remplit de terreur et d’admiration les gens de Navarre et de Castille.

Chelinde et Mosco, tous deux bâtards de feu Calabrun, roi d’Aragon, et Calamidor de Barcelone, réputés parmi les plus vaillants, avaient laissé derrière eux leurs étendards ; croyant