Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/51

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et se précipite sur lui avec Bayard. Il le frappe et le heurte tout à la fois en plein flanc, et le renverse ainsi que son destrier.

Pendant qu’en dehors des murs, la haine, la rage, la fureur poussent les deux armées à s’exterminer dans une si cruelle bataille, Rodomont, dans Paris, égorge la population et brûle les palais et les temples sacrés. Charles, qui combat sur un autre point, ne voit rien de cela et n’en entend point parler. Il est occupé à recevoir dans la ville Odoard et Ariman avec leurs troupes de Bretagne.

Lorsque arrive près de lui un écuyer, la pâleur au visage, et qui peut à peine tirer un souffle de sa poitrine : « Hélas ! seigneur, hélas ! — répète-t-il plusieurs fois, avant de pouvoir dire autre chose, — aujourd’hui l’empire romain descend dans la tombe ; le Christ a abandonné aujourd’hui son peuple ; un démon est tombé du ciel pour rendre cette-cité à jamais inhabitable.

« Satan, — ce ne peut être un autre que lui, — ruine et détruit la malheureuse cité. Tourne-toi et regarde les tourbillons de fumée produits par la flamme dévastatrice. Écoute la plainte qui retentit jusqu’au ciel et vient confirmer ce que te dit ton serviteur. C’est un seul homme qui, par le fer et le feu, saccage ta belle ville ; et devant lui chacun prend la fuite. »

Comme celui qui commence par entendre le tumulte et le battement répété du tocsin, puis aperçoit près de lui, et le touchant presque, l’incendie que chacun connaissait déjà, tel est