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Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/71

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Le chevalier d’Antioche, plus que tout autre vil, s’arme aussi, et lui tient compagnie. Leur hôte prévenant leur avait fait préparer des lances solides et fortes, grosses comme des antennes. Lui-même les accompagne sur la place, escorté de nombreux parents et après avoir mis à leur service des écuyers à cheval et à pied.

Ils arrivèrent sur la place et se tinrent à l’écart, ne voulant point parader dans la lice, mais examiner de leur mieux les beaux enfants de Mars qui arrivaient seuls, ou par groupes de deux ou de trois. Ils portaient des couleurs joyeuses ou tristes, pour indiquer à leur dame l’état de leur cœur ; la façon dont ils portaient leur cimier, ou dont ils avaient fait peindre leur écu, indiquait si l’amour leur était doux ou cruel.

À cette époque, les Syriens avaient coutume de s’armer comme les chevaliers du Ponant. Ils avaient pris probablement cette habitude au voisinage continuel des Français, qui possédaient alors la terre sainte où s’incarna le Dieu tout-puissant, et qu’aujourd’hui les chrétiens, orgueilleux et misérables, laissent, à leur honte, aux mains des chiens d’infidèles.

Alors qu’ils devraient abaisser la lance pour la défense de la sainte Foi, ils la tournent contre leur propre poitrine et détruisent le peu qui reste de ceux qui croient. Ô vous, gens d’Espagne, vous, gens de France, et vous, Suisses, Allemands, dirigez ailleurs vos pas.Vous avez de plus justes conquêtes à faire, car tous les pays. que vous dévastez