Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/81

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porte une blanche armure, et dont le coursier est également blanc. Il ignorait en effet le nom du vainqueur.

Le misérable qui était revêtu des vêtements qui ne lui appartenaient pas, semblable à l’âne couvert de la peau du lion, s’avance vers Norandin, à la place de Griffon, dès qu’il entend l’ordre concernant celui-ci, et auquel il s’attendait. Le roi se lève et vient d’un air courtois à sa rencontre ; il l’entoure de ses bras, l’embrasse, et le fait asseoir à ses côtés. Il ne se contente pas de le combler d’honneurs et d’éloges, il veut que le bruit de sa valeur retentisse en tous lieux.

Il fait publier, au son des trompettes, le nom du vainqueur du tournoi, et ce nom indigne se répand sur toutes les estrades et est répété dans toutes les bouches. Le roi veut qu’il chevauche à ses côtés quand le cortège retourne au palais ; il lui prodigue de telles faveurs, qu’il n’aurait pas plus fait si c’eût été Hercule ou Mars.

Il lui fait donner dans le palais même un bel appartement, magnifiquement orné ; enfin pour honorer aussi Origile, il met à sa disposition ses pages et ses chevaliers. Mais il est temps que je reparle de Griffon, qui, sans se douter d’une trahison de la part de son compagnon, s’était endormi et ne se réveilla que le soir.

Dès qu’il est réveillé et qu’il s’aperçoit de l’heure tardive, il sort en toute hâte de sa chambre, et court à l’endroit où il a laissé la