Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 2.djvu/98

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guerriers d’Espagne. Son infanterie au centre et sa cavalerie aux deux ailes, le roi Charles pousse au combat son vaillant peuple, avec un tel fracas de tambours et de trompettes, qu’il semble que tout l’univers en retentisse.

Les escadrons sarrasins commençaient à fléchir, et ils étaient sur le point de faire volte-face, au risque d’être tous massacrés, rompus et dispersés sans espoir de pouvoir jamais se rallier, lorsque parurent le roi Grandonio et Falsiron, qui s’étaient déjà trouvés en de plus grands périls, et suivis de Balugant, du féroce Serpentin, et de Ferragus qui les encourageait de sa grande voix :

« Ah ! — disait-il, — vaillants hommes, compagnons, frères, tenez ferme dans vos positions. Les ennemis s’épuiseront en efforts inutiles si nous ne manquons pas à notre devoir. Songez à la gloire éclatante, à l’immense butin que la fortune vous réserve aujourd’hui si vous êtes vainqueurs. Songez, en revanche, à la honte, aux dangers suprêmes qui nous attendent si nous sommes vaincus. »

Tout en parlant, il avait saisi une énorme lance ; il fond avec elle sur Bérenger qui combat contre l’Argaliffe, et lui rompt le casque sur la tête. Il le jette à terre, et de son épée terrible, renverse encore huit autres chevaliers. À chaque coup qu’il porte, il fait choir un cavalier au moins.

D’un autre côté, Renaud avait occis tant de païens que je ne saurais les compter. Devant lui,