Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/167

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reprocher — conduite indigne de lui— de ne s’être pas présenté sur le champ du combat, au jour fixé, pour vider leur différend.

Il ajoute : « Tu espérais sans doute, en te cachant ce jour-là, que nous ne nous rencontrerions plus jamais en ce monde ; or, tu vois que je t’ai rejoint. Quand même tu descendrais sur les rives les plus extrêmes du Styx, quand même tu monterais au ciel, sois certain que je t’y suivrais, si tu emmenais avec toi ton destrier au séjour de la lumière, ou là-bas dans le monde aveugle.

« Si tu n’as pas le cœur de te mesurer avec moi, et si tu comprends que tu n’es pas de force égale ; si tu estimes la vie plus que l’honneur, tu peux sans péril te tirer d’affaire, en me laissant de bonne grâce ton coursier. Tu pourras vivre ensuite, si vivre t’est cher ; mais tu vivras à pied, car tu ne mérites pas de posséder un cheval, toi qui déshonores à ce point la chevalerie. »

Ces paroles avaient été dites en présence de Richardet et de Guidon le sauvage. Tous deux tirent en même temps leur épée pour châtier le Sérican. Mais Renaud s’oppose à leur intervention, et ne souffre point qu’ils lui fassent cet affront. Il dit : « Ne suis-je donc pas bon pour répondre à qui m’outrage, sans avoir besoin de vous ? » Puis, se retournant vers le païen, il dit : « Écoute, Gradasse ; je veux, si tu consens à m’entendre, te prouver clairement que je suis allé sur le bord de la mer pour te rejoindre. Puis, je te soutiendrai les armes à la main, que je t’ai dit