Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/248

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pour s’être écarté du droit chemin, est puni par Dieu, lequel s’irrite d’autant plus contre ceux qui l’offensent, qu’il les aime mieux.

« Votre Roland, à qui Dieu a donné dès sa naissance une force extraordinaire en même temps qu’une grande vaillance ; auquel il a concédé le don surhumain d’être invulnérable, afin qu’il servît de défenseur de sa sainte Foi, de même qu’il constitua jadis Samson pour défenseur des Hébreux contre les Philistins ;

« Votre Roland a mal récompensé son Seigneur de tant de bienfaits, en abandonnant le peuple fidèle, au moment même où il aurait dû lui venir le plus en aide. L’incestueux amour d’une païenne l’a tellement aveuglé, qu’à deux reprises déjà il a poussé la cruauté et la colère jusqu’à vouloir donner la mort à son loyal cousin.

« Pour le punir, Dieu a voulu qu’il soit frappé de folie, et qu’il aille montrant dans toute leur nudité son ventre, sa poitrine et ses flancs. Son intelligence est à ce point troublée, qu’il ne peut reconnaître personne, et encore moins se reconnaître lui-même. C’est ainsi que l’Écriture nous apprend que Dieu voulut punir aussi Nabuchodonosor, en l’envoyant, pendant sept ans, dans le corps d’un bœuf furieux, paître l’herbe et le foin.

« Mais la faute du paladin ayant été moindre que celle de Nabuchodonosor, trois mois seulement lui ont été assignés pour s’en laver. Si le Rédempteur t’a permis de monter jusqu’ici, en passant par un si périlleux chemin, c’est uniquement