Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 3.djvu/99

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Et il traite son intention d’insensée et de légère ; et il dit que pour sûr elle se trompe beaucoup trop, et qu’elle ne doit pas être moins blâniée que l’avare qui enfouit son trésor sous terre, sans utilité pour lui et pour les autres hommes. Ce sont les lions, les ours et les serpents que l’on doit enfermer, et non les créatures belles et inoffensives.

Le moine qui avait l’oreille à tout cela, prêt à venir au secours de l’imprudente jouvencelle afin de l’empêcher de se rejeter dans la vieille voie, se tenait au gouvernail, comme le pilote expérimenté. Il s’empressa de dresser devant elle une table somptueusement chargée de mets spirituels. Mais le Sarrasin, qui était né avec de mauvais goûts, ne les savoura point, et les trouva fort déplaisants.

Puis, comme il interrompait en vain le moine sans pouvoir le faire taire, il perdit patience et, plein de fureur, le saisit dans ses mains. Mais si je vous en disais davantage, mon récit pourrait vous paraître trop long. C’est pourquoi je terminerai ce chant, prenant leçon sur ce qui arriva au vieillard pour avoir trop parlé.