Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/106

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et aperçoit non loin de là l’écueil aride que lui et ses compagnons ont en vain voulu éviter.

Il espère atteindre en nageant ses bords et se mettre à l’abri de la vague. Il s’avance et rejette en soufflant loin de son visage l’onde importune. Pendant ce temps, le vent et la tempête chassent devant eux le navire abandonné par ceux qui, dans l’espoir de se sauver, ont trouvé la mort.

Oh ! que les prévisions des hommes sont trompeuses ! Le navire, qui semblait perdu, échappa au naufrage dès que le patron et les matelots l’eurent abandonné, sans gouvernail, à la merci des flots. On aurait dit que le vent avait attendu que le dernier homme de l’équipage l’eût quitté, pour changer de direction. Il souffla de telle façon, que le navire, prenant une meilleure voie, évita l’écueil et fut emporté sur une mer moins furieuse.

Et tandis qu’il avait été incertain de sa route pendant que le pilote le dirigeait, il alla droit en Afrique, dès qu’il ne fut plus conduit par personne. Il s’en vint échouer à deux ou trois milles près de Biserte, du côté de l’Égypte. L’eau et le vent venant à lui manquer tout à coup, il resta enfoncé dans le sable de ce rivage stérile et désert. Juste à ce moment, arriva Roland, qui se promenait, comme je vous l’ai raconté plus haut.

Désireux de savoir si ce navire était vide ou chargé, Roland, suivi de Brandimart et de son beau-frère, sauta dans une barque légère et poussa jusqu’au bâtiment échoué. Étant monté sur le pont, il ne vit personne, et trouva seulement le bon