Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/117

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une vision à sa fidèle épouse, qu’il lui dirait par qui il avait été mis à mort, et lui montrerait l’endroit où gisait son corps. Qu’alors Bradamante, accompagnée de sa vaillante belle-sœur, détruirait par le fer et le feu tous ceux de la maison de Poitiers, et que son fils Roger, parvenu à un certain âge, en ferait autant pour les Mayençais.

Il lui avait parlé des Azzons, des Alberti, des Obbizons et de leur belle postérité, jusqu’à Nicolo, Leonello, Borso, Hercule, Alphonse, Hippolyte et Isabelle. Mais le saint vieillard, qui sait retenir sa langue, ne dit pas tout ce qu’il connaît ; il ne raconte à Roger que ce qu’il doit lui raconter, et retient ce qu’il doit garder pour lui.

Cependant Roland, Brandimart et le marquis Olivier, la lance basse, se précipitent à la rencontre du Mars sarrasin. C’est ainsi qu’on peut nommer Gradasse. Du côté opposé, leurs deux autres adversaires ont mis leurs bons destriers au galop, je veux parler du roi Agramant et du roi Sobrin. Le bruit de leur course fait retentir le rivage et la mer prochaine.

Quand ils en vinrent à s’entrechoquer, les lances volèrent en éclats jusqu’au ciel, et l’on vit la mer se soulever sous cette effroyable rumeur que l’on entendit jusqu’en France. Roland et Gradasse étaient en face l’un de l’autre. La balance aurait été égale entre eux, si la possession de Bayard n’eût constitué pour Gradasse un avantage qui le faisait paraître plus vaillant.

Bayard heurte le destrier de moindre force que