Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/143

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avoir rendu la liberté. Il sent en effet que désormais son cœur est délivré de son angoisse amoureuse.

Angélique est redevenue l’objet de sa haine première ; non seulement elle ne lui paraît pas digne de tout le long chemin qu’il a déjà fait pour la suivre, mais il ne ferait pas maintenant une demi-lieue pour elle. Cependant il persiste dans sa résolution d’aller dans l’Inde, pour chercher Bayard jusqu’en Séricane, tant parce que l’honneur le lui commande, que parce que c’est le prétexte qu’il a invoqué près de Charles.

Il arrive le jour suivant à Bâle, où venait de parvenir la nouvelle que le comte Roland devait se battre contre Gradasse et le roi Agramant. Ce n’était point par un avis du chevalier d’Anglante que cette nouvelle avait été sue, mais un voyageur, venu rapidement de Sicile, l’avait donnée comme sûre.

Renaud désire ardemment se trouver à côté de Roland dans ce combat ; mais il est bien éloigné du champ de bataille. Tous les dix milles, il change de chevaux et de guides, et court à bride abattue. Il passe le Rhin à Constance, et, comme en volant, il traverse les Alpes et arrive en Italie. Laissant derrière lui Vérone et Mantoue, il atteint le Pô, et le passe en toute hâte.

Déjà le soleil touchait au terme de sa course, déjà la première étoile apparaissait au ciel, et Renaud, debout près de la rive, se demandait s’il devait changer de cheval, ou se reposer en ce lieu,