Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/175

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qui se vantait et faisait métier de prédire l’avenir, et fort versé dans l’art de la magie et des sortilèges.

« Il lui demande, comme une grâce, de chercher à voir si sa femme, nommée Argia, pendant le temps qu’il serait séparé d’elle, resterait fidèle et chaste, ou si le contraire devait arriver. L’ami, cédant à ses prières, tire ses lignes et les applique sur le ciel, comme il paraît qu’elles doivent être. Anselme le laisse à sa besogne, et revient le voir le jour suivant pour connaître la réponse.

« L’astrologue tenait les lèvres closes, pour ne pas dire au docteur quelque chose qui lui aurait fait de la peine ; il cherche une foule d’excuses pour se taire. Quand enfin il voit qu’Anselme est résolu à voir son propre mal, il lui apprend qu’à peine aura-t-il franchi le seuil de sa maison, sa femme rompra sa foi, séduite non par la beauté ou par les prières, mais gagnée par des présents et de l’argent.

« Combien ces prédictions menaçantes des puissances supérieures, jointes à la crainte, au doute qu’il avait déjà, lui bouleversèrent le cœur, tu peux le penser toi-même, si les accidents d’amour te sont connus. Ce qui lui causait le plus de chagrin, ce qui lui tourmentait par-dessus tout l’esprit, c’était de savoir que sa femme, poussée par l’avarice, oublierait pour de l’argent toute pudeur.

« Afin de faire tout son possible pour ne pas la laisser tomber dans une telle faute — car souvent le besoin pousse les hommes à dépouiller les autels — il remit entre les mains de sa femme tous