Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/22

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dans votre royaume, réponds que j’apporte à son saint temple les dépouilles de ce monstre impitoyable, et qu’il n’y a pas de plus grand mérite que d’exterminer de pareils scélérats, abominable peste pour le monde. »

« Ces dernières paroles s’exhalent avec sa vie. Morte, son visage porte encore les traces de la joie qu’elle a éprouvée en punissant le barbare qui lui avait ravi son cher mari. Je ne sais si elle fut précédée ou suivie par l’âme de Tanacre. Je crois cependant qu’il mourut avant elle, car il avait.absorbé une plus grande quantité de breuvage, et le poison dut agir plus rapidement sur lui.

« Marganor, qui voit son fils tomber et mourir dans ses bras, est sur le point de mourir avec lui, vaincu par la douleur qui le saisit d’une manière si inattendue. Après avoir eu deux fils, il se retrouve seul, et ce sont deux femmes qui les ont fait mourir. L’une a été la cause de la mort du premier, l’autre a frappé elle-même le second.

« L’amour, la pitié, le dépit, la douleur et la colère, un désir de mort et de vengeance agitent cet infortuné père ; il tremble, comme la mer troublée par le vent. Il court vers Drusille pour se venger sur elle, mais il voit que la vie vient de l’abandonner. Excité par sa haine ardente, il cherche à frapper ce corps qui ne sent plus rien.

« De même que le serpent se retourne pour mordre la lance qui l’a cloué sur le sable ; de même que le mâtin court après la pierre que lui a lancée le passant, et se brise en vain les dents de