Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/258

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avant que Charles, sur les prières de Bradamante, n’eût fait publier le ban qui a fait venir ici Léon, et qui l’a fait affronter la bataille. » C’est ainsi qu’Aymon raisonnait contre Renaud et contre Roland, pour prouver la fausseté de la promesse contractée par les deux amants. Quant à Charles, il se bornait à écouter, et ne voulait se prononcer ni d’un côté ni de l’autre.

De même que, lorsque l’austral et l’aquilon soufflent, on. entend les feuilles frémir dans les forêts profondes, ou de même que l’on entend mugir les ondes sur le rivage, quand Éole se dispute avec Neptune, ainsi, par toute la France, court et se répand une rumeur immense. À force de se propager de côtés et d’autres, la nouvelle finit par se dénaturer tout à fait.

Les uns prennent parti pour Roger, les autres pour Léon. Cependant le plus grand nombre est pour Roger. Aymon a à peine une voix sur dix en sa faveur. L’empereur ne se prononce pour aucune des deux parties, mais il renvoie la cause à son parlement. Marphise, voyant que le mariage est différé, s’avance et propose un nouveau moyen.

Elle dit : « Comme je sais que Bradamante ne peut appartenir à un autre, tant que mon frère sera vivant, si Léon le veut, qu’il se montre assez hardi et assez fort pour arracher la vie à Roger. Celui des deux prétendants qui plongera l’autre dans la tombe restera sans rival, et possédera l’objet de ses désirs. » Aussitôt Charles transmet