Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/289

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d’adresse, leurs chevaux dociles et légers, ils cherchent de la pointe de l’épée le défaut de leurs cuirasses.

La poitrine de Rodomont n’était plus protégée par la rude écaille du serpent ; il n’avait plus à la main l’épée tranchante de Nemrod, et son front n’était plus armé de son casque ordinaire.il avait laissé les armes qu’il portait d’habitude, suspendues au monument d’Isabelle, après avoir été vaincu sur le pont par la dame de Dordogne, comme il me semble vous l’avoir dit plus haut.

Il avait une nouvelle armure fort bonne, mais qui était loin d’être aussi parfaite que la première. Mais pas plus l’ancienne que la nouvelle n’aurait arrêté Balisarde, à laquelle ne résistait ni enchantement, ni finesse d’acier, ni dureté de trempe. Roger s’escrime si bien de çà et de là, qu’il a déjà percé les armes du païen en plus d’un endroit.

Quand le païen voit son sang rougir ses armes de tous côtés, et qu’il ne peut éviter que la plus grande partie des coups qu’on lui porte arrivent jusqu’à sa chair, il est saisi d’une rage plus grande, d’une fureur plus intense que la mer un jour de tempête au cœur de l’hiver. Il jette son écu, et prenant son épée à deux mains, il frappe de toutes ses forces sur le casque de Roger.

La machine qui est supportée sur le Pô par deux bateaux, et dont le marteau relevé au moyen d’hommes et de roues, retombe sur les poutres aiguisées en pointes, ne frappe pas des coups plus formidables que celui que le fier païen asséna de