Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/290

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toutes ses forces sur la tête de Roger. Ce dernier fut protégé par son casque enchanté ; sans cela, lui et son cheval auraient été fendus d’un seul coup.

Roger s’incline à deux reprises ; il ouvre les bras et les jambes comme s’il allait tomber. Avant qu’il ait eu le temps de se remettre, le Sarrasin lui porte un second coup plus terrible, suivi d’un troisième. Mais son glaive trop faible ne peut supporter une si rude besogne ; il vole en éclats, et laisse la main du cruel païen désarmée.

Rodomont ne s’arrête point pour cela. Il s’approche de Roger qui est encore privé de sentiment, tellement les coups qu’il a reçus sur la tête lui ont troublé la cervelle. Mais le Sarrasin ne tarde pas à le réveiller de ce lourd sommeil ; de son bras puissant, il lui enlace le cou et le serre avec une telle force, qu’il l’enlève des arçons, et le jette à terre.

Roger n’a pas plus tôt touché la lerre, qu’il se redresse plein de colère et de vergogne. Il jette les yeux sur Bradamante. Il la voit si troublée de sa chute, que son beau visage pâlit et que la vie est prête à l’abandonner. Roger, désireux d’effacer promptemen : cette honte que Rodomont lui a fait subir, saisit son épée et fond sur le païen.

Celui-ci le heurte de son destrier, mais Roger l’esquive adroitement en se rejetant en arrière. Au moment où le destrier passe devant lui, il le saisit à la bride de la main gauche, et le force à tourner sur lui-même, tandis que, de la main droite,