Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/90

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être le contraire. Il sait combien est mal accueilli, combien de larmes vaines est la plupart du temps forcé de répandre quiconque se laisse enlever son royaume, et va implorer ensuite le secours des Barbares.

Annibal, Jugurtha, et d’autres encore, en ont fourni d’irréfutables preuves dans l’antiquité, et de notre temps, Ludovic le More, remis aux mains d’un autre Ludovic. C’est sur cet exemple que votre frère Alphonse s’est appuyé, mon seigneur, en affirmant sans cesse que c’est être fou que d’avoir plus de confiance dans les autres qu’en soi-même.

Aussi, dans la guerre où il fut entraîné par le dépit du souverain pontife irrité, bien qu’il ne pût compter beaucoup sur la résistance de ses faibles sujets, bien que celui qui était venu à son secours eût été vaincu par l’armée italienne, et que son royaume fût au. pouvoir de l’ennemi, on ne put, ni par menaces ni par promesses, lui faire signer l’abandon de ses États.

Le roi Agramant, tournant sa proue vers l’Orient, avait repris le large, lorsqu’il fut assailli par une tempête impétueuse qui s’éleva de terre. Le nocher, assis au gouvernail, dit en levant les yeux au ciel : « — Je vois s’approcher un ouragan si terrible, que le navire ne pourra y résister.

« Si vous voulez bien, seigneurs, suivre mon conseil, il y a près d’ici, à main gauche, une île sur laquelle je crois prudent d’aborJer, jusqu’à ce que la fureur de la mer soit calmée. — » Agramant