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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/106

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

timide et si rougissante qu’ait été la jeune femme, quel que soit le monde correct auquel elle semble appartenir, la pose choisie est toujours la plus voluptueuse, et ce caractère d’impudeur s’accentue d’une façon encore plus significative à l’instant où la voix de l’opérateur dit :

— Ne bougez plus.

Tant la force de l’amour triomphe aisément des barrières de la retenue la plus élémentaire.

— A. B. C. no 436, dit une voix un peu angoissée, devant le guichet de la poste restante.

Et parmi une foule de lettres de formats divers un employé en choisit une et la remet avec indifférence à celle qui attend d’elle tout l’infini de la tendresse.

— Ô employé des postes, avec tes manches de lustrine, tes yeux pleins d’ennui, tes cheveux humides d’une pommade à bon marché, avec ta mauvaise humeur non déguisée, tu es peut-être le plus charmant de tous les messagers de l’amour. Tu es Mercure moderne, sous sa forme singulièrement transformée. Tu n’as pas le beau visage et les ailes de ce dieu, mais tes doigts tachés d’encre sont revêtus d’un charme non pareil quand ils saisissent le papier où brille une écriture aimée.