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Page:L’Art de séduire les hommes, suivi de L’Amour et les poisons, 1915.djvu/159

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L’ART DE SÉDUIRE LES HOMMES

« Quand nous rentrâmes au château, quand nous nous dîmes « Au revoir », le soir, je n’osai pas regarder Raymond en face.

« Nous avons passé ensemble plusieurs jours de bonheur fou, de bonheur qu’entrecoupait seulement la présence de l’éternelle Céline, lorsque nos ruses ne parvenaient pas à nous débarrasser d’elle. Nous avons eu d’exquises fuites en tête à tête dans le parc et il serait trop long de te redire les conversations osées, les mots ardents, les frôlements audacieux qui me brûlaient et me donnaient le vertige.

« Il m’a appris à aimer l’amour, non l’amour satisfait, repu, mais au contraire tout ce qui précède la chute, juste assez pour me rendre folle, pas trop pour me lasser de ce feu épuisant et pousser au paroxysme une curiosité qui me cerne les yeux et trouble mes nuits.

« Il a eu l’art de me faire entrevoir plus loin que ce qu’il m’a révélé ; et, le soir, en revivant par la pensée les heures passées, tous les gestes de la journée me semblent empreints d’une ridicule pudeur à côté de ce que me peint mon imagination.

« Ce que j’aime en lui, c’est le prestige de l’amant, c’est ce qui le fait créateur de plaisirs, de sensa-